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Cartographie du Delta

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Terre la plus récente d'Amérique du Nord, le delta du Mississippi s'est formé au cours des 7000 dernières années.

Après avoir comblé le golfe qui l'a précédé en 2000 ans, le Grand Fleuve a formé plusieurs lobes deltaïques successifs qui ont changé au fur et à mesure des défluviations du fleuve, toujours à la recherche du chemin le plus court vers la mer. La pointe actuelle formant le "Delta de la Balise" n'a pas plus de 1 000 ans. Seuls l'endiguement du fleuve et les barrages d’Old River ont prévenu une nouvelle défluviation du Mississippi vers le cours de l'Atchafalaya au 20e siècle.

René-Robert Cavelier de La Salle est le premier explorateur français à descendre le fleuve Mississippi en provenance du Canada jusqu’à la pointe du delta de la Balise en 1682. Il baptise cette terre « Louisiane » et la revendique au nom du Roi de France. Il est incapable toutefois de retrouver la position exacte du delta par la voie maritime. Sa tentative de colonisation lancée en 1684 échoue sur les côtes du Texas et il y perd la vie en 1687. Il faut attendre 1699 pour que l’expédition du franco-canadien Pierre Le Moyne d’Iberville ne localise précisément le delta dans le Golfe du Mexique. C’est en 1717, que son frère cadet de 20 ans, Jean-Baptiste Le Moyne de Bienville convainc John Law, financier du roi qui vient de racheter les droits de la Compagnie du Mississippi de fonder une nouvelle capitale de la Louisiane, qui est baptisée Nouvelle Orléans en l’honneur du Régent. Bien que la Compagnie du Mississippi s’effondre dans une faillite retentissante en 1720, La Nouvelle Orléans est tout de même fondée et devient la capitale de la Louisiane en 1723 en raison de sa situation stratégique et défensive dans les marais du delta. Pourtant, Le Blond de la Tour, l’ingénieur chargé d’aménager la nouvelle capitale relève en 1722 que « les terres de la Nouvelle Orléans sont si grasses, que, dès qu’il pleut, on y enfonce jusqu’aux genoux ».

Parmi les candidats favorablement impressionnés par le patronage prestigieux revendiqué par la nouvelle colonie, Antoine-Simon Le Page du Pratz, jeune architecte de 23 ans, s’embarque à La Rochelle en 1718. Il vit en Amérique en dirigeant des plantations jusqu’en 1734, et relate son expérience dans ses « Mémoires sur la Louisiane » qu’il publie par épisodes dans le Journal Économique à Paris entre 1751 et 1753. Ces chroniques sont finalement rassemblées en trois volumes dans une « Histoire de la Louisiane » qui est éditée en 1758. Il observe que les sols de la région qui entoure la Nouvelle Orléans où il a dirigé une plantation de 1728 à 1734 sont constitués de la boue déposée par le Mississippi lors de sa crue annuelle, qui commence généralement au début du printemps et dure environ trois mois. Ces sols marécageux se couvrent rapidement d’herbes et de roseaux, qui  interceptent les sédiments lors des crues ultérieures, en arrêtant la plus grande part à faible distance de la rivière. De cette manière, les rives du Mississippi deviennent plus hautes que le pays alentour.

Des plantations esclavagistes de riz et d’indigo sont loties le long du fleuve selon le système du rang canadien. Le code noir est introduit en Louisiane en 1724 et chaque planteur a la responsabilité d’aménager une digue de protection de ses terres sur les berges du fleuve. L’histoire de l’occupation et de l’aménagement du delta du Mississippi depuis le 18e siècle est une longue succession d’inondations, d’endiguements et de dérivations de plus en plus pharaoniques qui ont coupé les eaux du fleuve des marais environnants.

Le delta du Mississippi est constitué de sédiments non compactés et gorgés d'eau qui s'enfoncent en se compactant, un phénomène de subsidence, qui s'accélère quand on se rapproche de l'océan sous l'action des failles qui font glisser lentement les terres situées les plus au sud vers les abysses.  Lorsqu'un lobe deltaïque cesse d'être alimenté par le bras principal du fleuve, il tend inexorablement à se désintégrer dans le Golfe du Mexique qui regagne du terrain.

Privé de nouveaux apports sédimentaires par les hommes, le delta est submergé progressivement d’autant plus rapidement que les industries extractives prélèvent à partir des années 1940 des millions de mètres cubes de pétrole, de gaz naturel et d’eau du sous-sol qui accélèrent la subsidence du delta. 5 000 km² de marais littoraux ont cédé la place à des plans d'eau libre dans les deux derniers tiers du 20e siècle. Selon les modèles du service géologique fédéral la subsidence combinée à l'élévation du niveau marin pourrait provoquer la perte estimée de 1 800 km² supplémentaires de zones humides à l'horizon 2050. L’état de Louisiane dépense 1 milliard de dollars par an pour limiter cette submersion depuis 2007. Cette lutte désespérée pour sauver le delta est compliquée par l’accélération de la montée du niveau marin induite par le réchauffement global. Avec 75 000 km² de delta situé à moins d’un mètre d’altitude, la totalité du delta du Mississippi est susceptible d’être englouti d’ici la fin du siècle.

 

Publié en mai 2021

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