Lors des troubles politiques, de la Révolution à la Restauration, des Français se réfugient aux États-Unis. Certains achètent à des compagnies des terres dans les États récemment ouverts à la colonisation, mais ces spéculations se soldent par des échecs.
Royalistes et républicains se mettent à l’abri dans un pays neutre
Après l’indépendance des États-Unis, des commerçants, des hommes d’affaires et des artisans français s’installent dans les ports de la côte atlantique. Dans les années 1790, dix à vingt-cinq mille réfugiés ayant fui les troubles révolutionnaires en France arrivent sur les côtes américaines, vague après vague. La plupart, à l’instar de Talleyrand, Volney, Moreau de Saint-Méry, restent dans les villes du Nord-Est, Boston, New York et surtout Philadelphie, alors la ville la plus peuplée et celle où se réunit le Congrès fédéral. Dans le même temps des milliers de planteurs, dont des métis, quittent Saint-Domingue pour échapper à la révolte des esclaves. Ils se dirigent plutôt vers les États du Sud. Les États-Unis accueillent aussi de nombreux prêtres réfractaires et en 1791 des sulpiciens établissent à Baltimore le premier séminaire catholique du pays. Monarchistes, girondins, montagnards publient des journaux où ils rapportent les événements de France et s’affrontent à coups de pamphlets. Pour répondre aux besoins de solidarité, la première société française de bienfaisance mutuelle des États-Unis est fondée à Philadelphie en 1793.
Des spéculations hasardeuses sur les terres du Nouveau Monde
Des spéculateurs proches du pouvoir ayant acheté à très bas prix d’immenses étendues de terres prises aux tribus indiennes, ils en font la promotion jusqu’en Europe. Des proscrits pensent pouvoir se mettre à l’abri et faire une affaire avantageuse. Les Lettres d’un cultivateur américain, publiées par Michel-Guillaume Jean de Crèvecoeur en 1784 à Paris, ont pu les faire rêver d’une vie de colon sur la frontière. Mais, en 1790 à Gallipolis avec la Compagnie du Scioto (Ohio), en 1792 à Castorland (Etat de New York), en 1793 à Asylum (Pennsylvanie) où certains espéraient pouvoir accueillir Marie-Antoinette, les désillusions suivent rapidement : sur des territoires inconnus l’arpentage des propriétés traîne en longueur et lorsque des erreurs sont découvertes il faut déplacer les aménagements réalisés à grand peine ; la vie est difficile pour des colons qui ne sont pas des agriculteurs et les terrains sont mal adaptés aux cultures prévues ; des squatteurs américains occupent par la violence les terres dont la propriété est incertaine.
Les demi-soldes
En 1815, le retour au pouvoir des Bourbons oblige d’anciens officiers bonapartistes à quitter la France. Ils fondent la colonie de la vigne et de l’olivier dans l’Alabama, Aigleville sur les rives du Tombecbe, où ils sont rejoints par des réfugiés de Saint-Domingue qui introduisent la culture du coton, plus adaptée. Certains de ces demi-soldes partent en 1818 pour le Texas où ils participent à l’installation de Champ d’Asile. La popularité dont cette implantation militaire bénéficie en France devient un moyen de manifester une opposition au régime de la Restauration.
La plupart des exilés retournent en France dès que la situation est stabilisée. Ceux qui choisissent de rester s’intègrent et posent les bases de communautés nouvelles. Elles accueillent encore les quelques milliers de proscrits des mouvements révolutionnaires de 1830, 1848, 1851, 1870.
Publié en mai 2021