Jean-Pierre Dantan - voisin de Frédéric Chopin au Square d’Orléans

Observateur de ses contemporains

Formé d’abord par apprentissage auprès de son père, Jean-Pierre Dantan étudia dès 1823 à l’École des Beaux-Arts. Comme son frère aîné, Antoine Laurent, dit Dantan l’Aîné, il y suivit les cours de François-Joseph Bosio. Très tôt, il s’intéressa  aux portraits et aux thèmes en lien avec son époque.

Se spécialisant dans les petits bustes représentant la société du Paris romantique, il créa une sorte de panthéon des célébrités de l’époque : journalistes, musiciens, gens de théâtre, écrivains et peintres. Connu surtout pour ses portraits-charges qui lui valurent une grande renommée, il exécuta également des représentations réalistes, dans la convention sérieuse. D’ailleurs, la même personne fut souvent représentée de ces deux manières.

Ses portraits humoristiques étaient fréquemment accompagnés d’un rebus posé sur le socle, permettant de déchiffrer l’identité de la personne représentée. Largement connues dès 1832, ses créations gagnèrent encore en popularité avec la publication de Muséum Dantanorama, un recueil de ses œuvres lithographiées. 

Ces bustes, maintes fois reproduits à des fins commerciales, furent vendus, entre autres, par les frères Susse, dont le magasin situé passage des Panoramas à Paris, attirait des foules de curieux, désireux de voir, commenter et acheter les œuvres de l’artiste. Le romancier Paul de Kock l’évoque avec délectation dès les premières lignes de son roman la Pucelle de Belleville (1834).

Square d'Orléans à Paris – adresse des artistes

Au début des années 1830, Dantan s’installa square d’Orléans dans le quartier de la Nouvelle Athènes à Paris. Il y exposait ses œuvres, d’abord dans son atelier, puis dans un espace spécialement aménagé appelé  « Musée Dantan ». Le public pouvait non seulement les admirer mais aussi en commander des moulages dans la version humoristique ou sérieuse. Dans son Chez Dantan (1852), l’écrivain et journaliste Eugène Guinot donna une description détaillée de l’atelier de l’artiste, de la décoration intérieure de son appartement et de l’agencement des pièces exposées.

À partir de 1842, Frédéric Chopin s’installa dans le voisinage de Dantan. Ce dernier avait réalisé le buste du compositeur dans sa version « sérieuse » un an auparavant. Cette œuvre jouit d’une grande popularité et fut reproduite en de nombreux exemplaires. Chopin mentionne cette sculpture dans ses lettres échangées avec son ami Julian Fontana datées de la mi-juin et du 24 août 1841. Le musée Frédéric Chopin de Varsovie possède plusieurs exemplaires de ce portrait ainsi qu’un moulage en étain, réalisé dans l’atelier de Karol Juliusz Minter.

Quand Chopin quitta le square d’Orléans en 1849, Jean-Pierre Dantan reprit son appartement afin d’agrandir sa propre demeure.

Album de Dantan

Amateur et connaisseur de musique, Dantan était ami d’Hector Berlioz et fréquentait les salons de musique parisiens. Son installation square d’Orléans où il compta parmi ses voisins, outre Chopin, des musiciens tels que Pierre-Joseph Zimmermann, Antoine Marmontel, Alkan, Pauline Viardot, lui permit de resserrer  encore plus les liens avec ce milieu. L’Album d'autographes de musique collectionné de 1835 à 1869 par Dantan jeune, statuaire  que l’artiste légua à la Bibliothèque impériale devenue Bibliothèque nationale, témoigne de ses fascinations musicales et de ses riches relations amicales au sein de cette communauté. Parmi les 83 autographes musicaux y figure celui de Frédéric Chopin, daté de « Paris, 16 juin 1841 » qui comporte une dédicace, une signature ainsi qu’un fragment de l’Étude en Fa mineur. Le Musée Frédéric Chopin de Varsovie conserve un autre autographe de cette Étude (MC/188)

Rédigé en février 2024