Teofil Kwiatkowski

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Teofil Antoni Jaksa Kwiatkowski (1809-1891), peintre polonais de l’époque romantique, ami de Frédéric Chopin, exilé en France à partir de 1831.

En Pologne

Teofil Kwiatkowski débute ses études artistiques dans le département des beaux-arts à l'Université de Varsovie auprès d’Antoni Brodowski et d’Antoni Blank. Il cesse ses études lors du déclenchement de l’Insurrection de novembre (1830-1831) contre la Russie tsariste. Il s’engage alors comme sous-lieutenant dans le 4e régiment d’infanterie de ligne.

Émigration                  

Après l’échec du soulèvement de novembre, comme des milliers d'autres réfugiés, il s’exile en France. Il n'oubliera jamais son passé militaire et signe souvent ses œuvres: Officier du 4e régiment ou Officier de l’armée de Pologne à Paris.

En exil, Kwiatkowski continue sa formation artistique. Il étudie, entre autres, chez Léon Cogniet, maître de plusieurs autres peintres polonais. Il fait ses débuts au Salon de Paris en 1839 et y expose jusqu'en 1881.

Dès le début de son séjour en France, Kwiatkowski se lie avec les cercles de refugiés polonais réunis autour de l'Hôtel Lambert et avec le prince Adam Czartoryski et sa famille.

Amitié avec Frédéric Chopin

Une relation particulièrement amicale lie Teofil Kwiatkowski à Frédéric Chopin. Le peintre rend fréquemment visite au compositeur, devenant souvent le premier auditeur de ses œuvres. Il peint plusieurs portraits du pianiste. Le portrait de Chopin en robe de chambre, dans une pose décontractée, jouit d’une popularité particulière et Kwiatkowski répète cette composition à maintes reprises. Il ne s’agit pas d’un portrait officiel, mais plutôt d’une volonté de montrer un moment d'inspiration d'un artiste romantique et de souligner le lien proche et intime entre le peintre et son modèle (p.ex. Portrait de Frédéric Chopin en robe de chambre= Portret Fryderyka Chopina w stroju domowym, 1849, MNW)

Présent aux derniers instants de la vie de Chopin, Kwiatkowski exécute des dessins représentant le compositeur sur son lit de mort quelques heures à peine après son décès survenu le 17.X. 1849. Le thème de la mort d'un grand artiste est très à la mode dans l’art du XIXe siècle. Dans ce cas particulier, l’œuvre acquiert une valeur d’autant plus grande qu’elle est réalisée par un ami et témoin des derniers moments de la vie de Chopin.

On doit aussi à Kwiatkowski une aquarelle montrant l'appartement de la place Vendôme où Chopin a passé les dernières semaines de sa vie. Connue aujourd’hui uniquement par une reproduction, elle a servi de modèle pour aménagement du Salon Chopin à la Bibliothèque Polonaise de Paris au 6, Quai d’Orléans.

Bal à l'Hôtel Lambert (Polonaise de Chopin)

Le Bal à l'Hôtel Lambert (Polonaise de Chopin)= Bal w Hôtel Lambert (Polonez Chopina), une œuvre symbolique, dont on connaît plusieurs versions, occupe une place particulière dans l’oeuvre de Kwiatkowski. On y voit Frédéric Chopin, entouré par des personnages importants de l'histoire polonaise, les membres de la famille Czartoryski ainsi que Adam Mickiewicz et Teofil Kwiatkowski lui-même et bien d’autres. Elle a été inspirée par les célèbres bals de charité costumés, donnés à l’Hôtel Lambert, la résidence des princes Czartoryski sur l'île de Saint-Louis. S’y réunissait la haute société parisienne et un nombre important des représentants de la Grande Émigration. Une autre source d’inspiration est une vision artistique de Chopin, lors de son séjour au monastère de Valldemossa à Majorque. D’une manière imaginaire, il « voit » une procession de chevaliers polonais évoluant lentement, solennellement, au rythme d’une polonaise. On y associe plus précisément la Polonaise en La majeur. Kwiatkowski offre donc une vision originale de l'apothéose de la Pologne d’autrefois, unie avec la vie contemporaine de cette émigration et la légende naissante de Chopin. De surcroît, il glorifie et rend hommage à la famille Czartoryski, considérée par les milieux émigrés comme une famille royale. C’est une image symbolique du passé, pénétrant et affectant le présent.

Les autres œuvres de Kwiatkowski

Teofil Kwiatkowski a laissé un grand nombre de portraits romantiques de ses contemporains et notamment ceux de la famille Czartoryski, d’Adam Mickiewicz et bien d’autres. Il a dédié plusieurs œuvres à la cause polonaise, si chère à ses compatriotes en exil.

Ses petites aquarelles allégoriques, dont il existe de nombreuses variantes, sont inspirées par des événements historiques en rapport avec la Pologne, mais aussi avec la France, telle que la guerre franco-prussienne de 1870 (Sur le champ de bataille=Na pobojowisku, postérieur à 1871, MNW).

Il s’est employé à illustrer la splendeur de l’ancienne noblesse et de la chevalerie polonaises dans des scènes de cour, des processions, et des danses (Nos grands seigneurs= Nasze wielkie pany, environ 1855, MNW).

Parmi ses compositions, on trouve aussi celles aux motifs fantastiques dont toute une série, principalement des aquarelles, aborde le thème des Sirènes. Une de ces versions présentée au Salon de Paris en 1846 est remarquée par des critiques français. Théophile Gautier, qui entre en possession d’une de ces aquarelles dans les années 1846-1849, s’en inspire pour écrire le poème Néréides, publié dans le recueil Emaux et camées:

"J'ai dans ma chambre une aquarelle
Bizarre, et d'un peintre avec qui
Mètre et rime sont en querelle,
- Théophile Kniatowski.

Sur l'écume blanche qui frange
Le manteau glauque de la mer
Se groupent en bouquet étrange
Trois nymphes, fleurs du gouffre amer (…)"

On trouve dans l’œuvre de Kwiatkowski également des œuvres réalisées dans le style troubadour montrant courtisans, chevaliers, dames et troubadours sur fond de châteaux et de jardins romantiques (Dame avec un enfant et un chien= Dama z dzieckiem i psem, environ 1850, MNW). Il a peint également des paysages des régions françaises: la Normandie, la Provence, la côte méditerranéenne, et après son mariage avec Marie Caroline Jordan (1859), principalement la Bourgogne (Paysage de la Vallée du Cousin= Pejzaż z doliny Cousin, postérieur à 1871, MNW).

Son œuvre est imprégnée d’une atmosphère pleine de poésie, de fantaisie et de lyrisme. Il excelle dans l’aquarelle qui est sa technique de prédilection.

Légende de l'illustration : Zygmunta żołnierz polski. T. Kwiatkowski. 1860