Élève du collège jésuite Saint-Xavier de Calcutta, Jagadish Chandra Bose (1858-1937) poursuit ses études à l’université de Londres puis à Cambridge sous l’autorité de maîtres tels que Lord Rayleigh et Francis Darwin. Professeur au Présidency College de Calcutta, il invente un cohéreur d’ondes et réalise en 1895, deux ans avant Marconi, une démonstration de transmission par radio sans fil. Le physicien Neville Mott estime qu’il a alors soixante ans d’avance sur son temps. Alors qu’il est à Londres à l’invitation de Lord Rayleigh en janvier 1897, il refuse de déposer un brevet et repousse les offres des partenaires financiers de Marconi, estimant que l’intérêt public doit être la seule motivation de la recherche scientifique. Passionné de botanique, il met également au point un appareil détectant les réponses du « mécanisme nerveux » des végétaux aux stimuli extérieurs, confirmant ainsi les intuitions de Pierre Bertholon de Saint-Lazare, auteur en 1783 d’un ouvrage sur l’électricité des végétaux. En 1900, Bose présente ses travaux à Paris dans le cadre du Congrès international de physique. La conférence qu’il donne deux ans plus tard, à l’invitation de la Société française de physique, est publiée en août dans le Journal de physique. Sa réputation est désormais bien assise et ses ouvrages sont régulièrement traduits en français : on en compte six entre 1926 et 1934.
Élève de J. C. Bose au Presidency College, Sisir Kumar Mitra (1890-1963) prépare sa thèse sur la diffraction et l’interférence de la lumière sous la direction d’un autre grand physicien indien, C. V. Raman. Arrivé à Paris en 1919, il travaille sur les ondes radiophoniques sous l’autorité de Charles Fabry, qui a prouvé en 1913 l’existence de la couche d’ozone. En 1923, il soutient une seconde thèse, écrite en français et intitulée Détermination des étalons spectroscopiques dans la région des petites longueurs d’onde. Après un court passage à l’Institut du radium de Marie Curie, il poursuit ses recherches à l’université de Nancy auprès de Camille Gutton, un maître de la radioélectricité. Présent à Paris en même temps que S. K. Mitra, Nikhil Ranjan Sen (1894-1963), spécialiste des mathématiques appliquées, physicien reconnu et pionnier de la théorie de la relativité, travaille avec Louis de Broglie. Parcourant l’Europe, il rencontre également Max Planck et Albert Einstein.
Élève de Jagadish Chandra Bose, avec lequel il n’a aucun lien de parenté, Satyendranath Bose (1894-1974), commence sa carrière au département de physique de l’université de Calcutta puis de la jeune université de Dacca. C’est là qu’il réalise ses travaux sur les statistiques quantiques des photons qu’Albert Einstein, impressionné par l’article qu’il lui a envoyé, étend aux atomes. Les particules fondamentales dites bosons portent son nom. Bénéficiant d’une bourse de son université, il peut séjourner en Europe entre 1924 et 1926 et travailler avec Louis de Broglie, Marie Curie et Albert Einstein. Avec les deux grands physiciens français, il peut s’exprimer en français, langue qu’il maîtrise, de même que l’allemand.
Le prix Nobel qui a, injustement peut-être, échappé à J. C. Bose et S. Bose, est décerné à un physicien tamoul, Chandrashekhara Venkata Raman (1888-1970). Il commence sa carrière dans l’Indian Civil Service, avant que ses premiers travaux en optique ne l’imposent en 1914 comme professeur de physique à l’université de Calcutta. En 1924, il est élu membre de la Royal Society. En 1928, il est en mesure de présenter les conclusions de ses recherches sur la lumière : elles lui valent d’être reconnu par l’Académie française des sciences, qui en fait l’un de ses membres associés, et par la Sorbonne, dont il est nommé docteur honoris causa en 1929. En 1930 le prix Nobel de physique lui est décerné « pour ses travaux sur la diffusion de la lumière et pour la découverte de l’effet portant son nom », l’effet Raman.
Publié en Juillet 2024