Chimie

Prafulla Chandra Ray (1861-1944) est issu d’une famille aisée du Bengale oriental, acquise aux idées réformistes du Brahmo Samaj. Très jeune, il se passionne pour la littérature bengalie, l’histoire et les langues : il assimile le sanskrit, le grec, le latin et le français. Son professeur de littérature anglaise à la Metropolitan Institution, où il est admis en 1878, est le grand leader nationaliste Surendranath Banerjee, sous l’influence duquel il se convainc que l’avenir de l’Inde dépendra de la qualité de sa recherche scientifique. Alors que, jusque-là, il s’est passionné pour l’histoire, les lettres et les langues, il découvre la chimie au Presidency College de Calcutta. Ayant obtenu une bourse, il s’embarque pour l’Europe en 1882 et poursuit sa formation de chimiste à l’université d’Édimbourg, où il s’oriente vers la chimie minérale. Il soutient en 1887 sa thèse intitulée Conjugated Sulphates of the Coppermagnesium Group: A Study of Isomorphous Mixtures and Molecular Combinations. Sa passion pour l’histoire ne le quittant pas, il rédige une étude sur l’Inde avant et après la révolte des Cipayes. Bien que fort critique à l’égard de la politique britannique, elle lui vaut les louanges de ses maîtres et condisciples et est publiée sous le titre Essays on India.

De retour en Inde en 1889, il exerce les fonctions de professeur au Presidency College. Le 2 juillet 1897, il sollicite l’avis de Marcelin Berthelot (1827-1907), le « plus grand maître en chimie synthétique », sur ses propres travaux sur le nitrite mercureux. Ainsi commencent une correspondance de plusieurs années, une fructueuse collaboration franco-indienne dans le domaine de la chimie et une sincère amitié entre le vieux savant français et son jeune admirateur indien. Le 26 juillet 1897, dans une réponse chaleureuse, Berthelot se réjouit que « la science avec son caractère universel et impersonnel [soit] cultivée chez tous les peuples civilisés, en Asie, aussi bien qu’en Europe et en Amérique. » Lui qui a publié un article sur la chimie des Chinois et « trois volumes sur l’histoire de la chimie au moyen âge : le 1er relatif à la transmission de la science antique, le 2e à l’alchimie syriaque, le 3e à l’alchimie arabe », encourage Ray, qui est historien autant que chimiste, à se lancer dans des recherches sur l’histoire de la chimie indienne, dont il pense qu’elle a des origines grecques.

Répondant au vœu de Berthelot, P. C. Ray, qui pense quant à lui que l’alchimie indienne ne doit rien à l’Occident, publie en 1902 le premier volume de son History of Hindu Chemistry. Il consacre sa préface à un hommage au « doyen du monde de la chimie ». En 1905, P.C. Ray peut visiter Paris, grâce à une aide de la Direction de l’enseignement de Calcutta. Le sanskritiste Sylvain Lévi, qui l’accueille, lui permet de rencontrer Marcelin Berthelot au Collège de France. Deux ans après, le chimiste de Calcutta apprend avec tristesse la mort de son maître, à la mémoire duquel il dédie le second volume de son histoire de la chimie hindoue.

 

Publié en juillet 2024