Traductions en français de grands ouvrages de la littérature polonaise.
Le 16e siècle
Au 16e siècle, Polonia (1577), l'ouvrage de Martin Kromer, diplomate et historien polonais, servit de source d'information sur la Pologne aux lecteurs français. Le livre fut connu par Michel de Montaigne ; grâce à lui l'image du « pays sur la Vistule » put atteindre le large public en France. Le poème Lutetiae Parisiorum descriptio, publié à Paris en 1543, 1591 et 1611, est un exemple intéressant des relations franco-polonaises. Eustathius von Knobelsdorf, chanoine de Vratislavie et Varmie, poète latin et humaniste, inclut dans ce poème rimé une apothéose de Paris, ville de la science, et exprima son admiration pour l'esprit français. Congé des ambassadeurs grecs, une tragédie classique de Jan Kochanowski, fut traduite en français plusieurs fois, tandis que la première version française des Thrènes du même auteur parut au 19e siècle. Au début des années 1930, Jacques Langlade publia les chants de Kochanowski. Un poème satirique Satyr (Satyre) de Kochanowski, dans la traduction de Jean Bourilly, parut en 1976. Bourilly traduisit aussi les œuvres d'autres classiques de la littérature polonaise: Juliusz Słowacki, Adam Mickiewicz, Zygmunt Krasiński et Cyprian Kamil Norwid. Kazania sejmowe (Sermons pour le parlement) de Piotr Skarga furent traduits en 1917.
Le siècle des Lumières
Stanislas Leszczynski, Roi de Pologne, Duc de Lorraine et beau-père de Louis XV, auteur de nombreux écrits en polonais, fut un personnage respecté en France. Son traité, La voix libre du citoyen, ou observations sur le gouvernement de Pologne, parut dans la traduction française en 1749. À l'époque moderne, l'influence de la culture française sur la culture européenne et, par conséquence, polonaise, grandit. Le français devint la langue de l'expression artistique des intellectuels venant de différentes cultures. Jan Potocki, l'auteur du roman Manuscrit trouvé à Saragosse (1805), fut l'un des écrivains polonais de langue française les plus connus.
Un poème descriptif Sophiowka (1804-1806) de Stanisław Trembecki, poète des Lumières et classiciste, fut inspiré par le poème Les Jardins de Jacques Delille et fut traduit en français une dizaine d'années après sa création (1815). Un roman sentimental Malvina ou l'instinct du cœur de Maria Anna Wirtemberska fut publié en France cinq ans après l'édition originale, alors que la traduction française du roman Journal de Françoise Krazinska de Klementyna Hoffmanowa parut dans les années 1840.
Les pièces de théâtre d'Alojzy Feliński, Franciszek Wężyk, Julian Ursyn Niemcewicz, Michał Kleofas Ogiński, Michał Mowiński et Jan Kochanowski se trouvèrent dans une anthologie intitulée Chefs-d'œuvre du théâtre polonais (1823). L'éditeur et l'auteur de la préface, Alphonse Denis, écrivit également une étude sur l'ancienne littérature polonaise.
Le traité Sur la nationalité des Polonais de Kazimierz Brodziński, l'auteur influencé par le mysticisme religieux et le messianisme, fut traduit du polonais vers le français à la fin du 19e siècle.
Le 19e siècle
Le 19e siècle constitue une époque importante dans l'histoire de la réception de la littérature polonaise en France. Durant cette période, les œuvres d'Adam Mickiewicz et d'autres poètes romantiques furent souvent traduites en français – parfois très vite, comme Konrad Wallenrod de Mickiewicz, dont la version française parut déjà en 1829. Il est à noter que les Aïeux du même auteur furent considerés par George Sand comme plus réussis que les œuvres contemporaines de Byron ou Goethe. En France, le rang de Mickiewicz fut encore renforcé grâce à une série de conférences sur les littératures slaves, qu'il rendit au Collège de France. Les ouvrages du poète polonais furent aussi popularisés par Kristien Ostrowski (1811-1889), l'émigrant et traducteur des œuvres politiques de Mickiewicz, publiées à plusieurs reprises, ainsi que l'auteur de la première traduction française en prose de Pan Tadeusz (1845). Dans les années 1870, Constantin Przezdziecki (se produisant sous le pseudonyme de Charles de Noire-Isle) combina le vers et la prose dans sa traduction de Pan Tadeusz (Messire Thadée). La première traduction complète en vers de cette œuvre célèbre fut publiée en 1899 par Venceslas Gasztowtt. Dans les années 1920, Paul Cazin, critique littéraire et traducteur, qui fut un personnage très important dans le domaine de la popularisation de la culture polonaise en France, publia une autre traduction de ce poème, derechef en prose. Cazin fut aussi l'auteur d'une traduction parfaite des mémoires de Jan Chyzostom Pasek, ainsi que des nouvelles de Norwid. En 1992, Robert Bourgeois et Roger Legras publièrent deux traductions de Pan Tadeusz (pour le moment, les plus récentes). Dans les années 1878-81 Charles de Noire-Isle édita une série de ses traductions sous le titre Poètes illustres de la Pologne au XIXe siècle, qui fut divisée en quatre cycles: poètes galiciens, lituaniens, ukrainiens et contemporains.
Après 1847, Anhelli de Juliusz Słowacki parut à maintes reprises dans les différentes traductions françaises. L'édition de 1878 fut publiée par Jules Mien, un Français installé en Pologne. Venceslas Gasztowtt, le fils d'un immigrant polonais, traduisit les textes de Słowacki en 1870-1911. D'autres traductions françaises de Słowacki parurent après la Seconde Guerre mondiale.
Auguste Lacussade et Constantine Goszczyński furent traducteurs des écrits de Zygmunt Krasiński. De plus, des traductions des œuvres d'Antoni Malczewski (1835), Seweryn Goszczyński, Ignacy Chodźko et Cyprian Kamil Norwid parurent en France.
Le début du 20e siècle
Le prix Nobel pour Quo Vadis de Henryk Sienkiewicz suscita l'intérêt du public français envers ce roman, dont le tirage, jusqu'en 1917, s'éleva à deux millions d'exemplaires. En 1935, Maria Kosko publia une monographie La fortune de Quo vadis ? de Sienkiewicz en France. Les autres romans de Sienkiewicz: Les Chevaliers teutoniques et sa Trilogie (Par le fer et par le feu, Le Déluge, Messire Wolodowski) ne remportèrent pas le même succès. Les traductions des nouvelles de Stefan Żeromski furent publiées dans les années 1901-1914. Franck-Louis Schoell, traducteur français de Reymont, promut bien cet écrivain en France. L'édition française du roman Les paysans (Chłopi) fut publiée en 1925. Pendant l'entre-deux-guerres, à l'initiative de Rosa Bailly, un magazine littéraire intitulé Les amis de la Pologne fut publié en France. Il y eut aussi une série d'œuvres littéraires Collection de Littérature Polonaise (on publia douze volumes entre 1932 et 1939). En outre, Pologne littéraire, un mensuel de langue française édité à Varsovie, popularisait la littérature polonaise au monde.
Légende de l'image : Les Ukrainiennes de Goszczynski et Malczeski. S. Goszczyński, 1835