Le sionisme

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Né en Europe au milieu du XIXe siècle, le sionisme s'est voulu un mouvement de régénération sociale et culturelle des juifs avant de devenir un mouvement politique aspirant à la création d'un État juif en Palestine.

Le nationalisme juif est apparu au milieu des années 1840 dans les communautés d’Europe centrale et orientale sous l’influence conjuguée de la Haskala, ou mouvement des Lumières juives, et du Printemps des peuples incitant toutes les minorités de ces régions à se définir par rapport à leur appartenance à un territoire, à une culture ou à une nation. Prônant, en même temps que la rupture avec la vie de ghetto, la régénération par le travail agricole et le renouveau culturel grâce à la renaissance de l’hébreu, rares furent cependant ceux qui envisageaient la Palestine comme l’unique endroit au monde où les juifs pourraient réaliser leurs ambitions nationales.

Au même moment, quelques rabbins et intellectuels pétris de mystique juive ainsi que nombre d’hommes de foi chrétiens préconisaient le retour des juifs vers la Terre promise. Une idée qui ne laissa pas indifférents des magnats occidentaux comme Moses Montefiore (1784-1885) et le baron Edmond de Rothschild (1845-1934) qui se portèrent acquéreurs de terres agricoles en Palestine pour l’installation de réfugiés juifs originaires d’Europe orientale. Une entreprise de colonisation  qui était loin de faire l’unanimité de tout le monde et qui pour le moins qu’on puisse dire ne fut pas accueillie avec bienveillance par la population arabe. Elle fut même à l’origine des premières publications à caractère antisémite en langue arabe rédigées par des journalistes et des essayistes chrétiens.  A l’exemple du pamphlet de Najib Azoury rédigé d’abord en français et intitulé « Le réveil de la nation arabe ou le péril juif universel » (1905) ou encore l’ouvrage de Georges Corneilhan, « Juifs et Opportunistes – le Judaïsme en Égypte et en Syrie » paru, à Paris, en 1889 avant d’être traduit, quatre ans plus tard  par Najib al-Hajj, un journaliste chrétien de Beyrouth qui se spécialisa dans la traduction arabe de textes anti-juifs diffusés en Europe. 

Cela dit, la première vague d’immigrants juifs en Palestine ou « première Aliya » n’avait pas de coloration politique bien nette. C’est de toute évidence, avec l’entrée en scène, à la fin du XIX° siècle, de Théodore Herzl (1860-1904) qui, le premier, parla ouvertement de la création d’un État juif que le sionisme prit l’allure d’un mouvement politique. 

Au départ, Herzl pensait que deux territoires entraient en ligne de compte pour la création de l’État juif en question : l’Argentine et, en second lieu seulement, la Palestine qui est « notre patrie historique inoubliable »  et constitue aussi vis-à-vis de l’Europe, « un élément du mur contre l’Asie ainsi que l’avant-poste de la civilisation contre la barbarie ». Par la suite et sous la pression des sionistes est-européens, sa préférence devait aller à  la Palestine, tout en n’excluant pas d’autres solutions de rechange comme Chypre, El-Arish, au nord de la péninsule du Sinaï ou encore l’Ouganda, trois emplacements qui lui furent timidement suggérés par la diplomatie britannique.

Raillé dans son propre milieu viennois et incompris par les juifs de l’Ouest, c’est principalement parmi les masses juives des ghettos de Galicie, de Pologne,  de Russie et de Roumanie que les idées de Théodore Herzl firent des émules. Personne dans ces communautés repues de culture et de folklore juifs n’avait le moindre doute concernant l’emplacement souhaitable du futur État des juifs : Eretz- Israël, la Palestine historique juive dont la seule évocation agissait sur les esprits bien plus profondément que tous les discours enflammés de Herzl et ses amis.

Herzl mourut en 1904. Il avait 44 ans à peine. Divisé entre territorialistes et « palestinophiles », beaucoup pensaient que le mouvement sioniste créé par Herzl ne survivrait pas longtemps à son fondateur. Mais c’était ne pas compter avec l’accélération de l’histoire et les bouleversements de la Première Guerre mondiale qui conduisirent l’Angleterre à publier, le 9 novembre 1917, la déclaration Balfour reconnaissant aux juifs le droit de disposer d’un Foyer national en Palestine.

Encore sous domination ottomane, l’ancienne Terre d’Israël comptait un peu moins de 20% de juifs, divisés en un « vieux Yishouv » de juifs autochtones, vivant dans le pays depuis des siècles et un « nouveau Yishouv » de pionniers  radicaux, répartis dans des dizaines de villages coopératifs et décidés à bâtir  en Palestine une société juive d’un type nouveau. Ce qui ne pouvait laisser indifférente la population  locale qui attendit la fin de la guerre et l’établissement du Mandat britannique en 1920 pour exprimer son mécontentement  et réclamer l’abrogation pure et simple de la déclaration Balfour.

Conscients de n’avoir pas suffisamment pris en considération les droits des Palestiniens, les Anglais tentent de corriger le tir, à chaque explosion de violence, comme en 1921, en 1929 et en 1939 en limitant les quotas d’immigration juive et en multipliant les restrictions sur les achats de terres par les institutions sionistes. Des mesures  qui s’avèrent néanmoins insuffisantes  pour calmer les appréhensions des Arabes et incapables à freiner le dynamisme du Yishouv  qui,  à partir de  fin des années 1920, a toutes les caractéristiques d’un mini-État en gestation, disposant de ses propres institutions politiques, économiques, culturelles et sécuritaires. De guerre lasse, les autorités du Mandat préconisent en juillet 1937 le partage de la Palestine en deux États . Accepté sans grand enthousiasme par les dirigeants sionistes, le plan est rejeté par les Palestiniens qui entrent aussitôt en rébellion. Les Anglais réagissent par une répression d’une rare violence qui affaiblit durablement les Palestiniens. L’imminence d’une nouvelle guerre mondiale se précisant et voulant se concilier les bonnes grâces des pays arabes, les Anglais publient en mai 1939 un Livre blanc qui limite de façon drastique l’immigration juive. Une mesure d’autant plus tragique  que depuis l’arrivée d’Hitler au pouvoir, en 1933, la Palestine était le seul coin du monde où les réfugiés juifs d’Allemagne et d’Europe centrale  pouvaient  espérer encore trouver un abri. Le Livre blanc reste en vigueur  durant  toutes les années  de guerre, jusqu’au 29 novembre 1947 quand l’Assemblée générale des Nations Unies approuve le partage de la Palestine et la création d’un État juif et d’un État arabe. Le premier voit le jour le 15 mai 1948, le second lutte encore pour son existence.

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