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L’Association des jeunes musiciens polonais à Paris

La réunion fondatrice de l’Association se tint le 22 décembre 1926 dans l’appartement de Stanisław Czapski, situé 8, boulevard de la Tour Maubourg. Les sept personnes présentes confirmèrent les statuts et choisirent le bureau de l’association. L’appartement de Piotr Perkowski, 36, rue Saint-André des Arts, accueillit le siège de l’organisation. Un an plus tard, l’Association loua un studio dans le nouveau bâtiment de la Salle Pleyel. En 1936, Auguste Mangeot permit à l’Association de s’installer à l’École normale de musique.

La modeste initiative d’une poignée de fondateurs se transforma rapidement en une action pérenne de promotion de la musique polonaise. Elle visait à intégrer la communauté polonaise, organiser des concerts et des conférences, régler les problèmes administratifs de ses membres et créer des réseaux professionnels. Elle octroyait en outre de modiques aides financières, accordait des réductions sur les billets de concert et les partitions de musique et finançait la location d’instruments.

Quoique faibles, les cotisations alimentaient en continu le budget de l’association. Des institutions polonaises, telles que le ministère de la Culture à Varsovie et l’ambassade de la République de Pologne à Paris, mais aussi des particuliers, en finançaient la plus grosse part. L’Association comptait dans ses rangs des « membres fondateurs et protecteurs », qui la soutenaient financièrement. Excellente au début, la situation financière, se dégrada néanmoins à partir de la moitié des années 30. Un plan d’économies fut alors mis en œuvre pour pouvoir continuer ses activités.

L’Association ne fédérait que des musiciens professionnels. Entre 1926 et 1939, 141 musiciens de diverses spécialités déposèrent une demande d’adhésion. Le candidat devait être diplômé de l’enseignement musical supérieur et recommandé par deux autres membres. Le bureau confirmait enfin son inscription. Les assemblées générales étaient organisées deux ou trois fois par an et des comptes rendus des activités artistiques et des rapports financiers dressés régulièrement. L’association était dotée d’un secrétariat à plein temps dont   toute la documentation a été conservée. Simon Laks la fit rapatrier en Pologne en 1967 et déposer à la Bibliothèque de l’université de Varsovie.

Des facteurs artistiques, institutionnels et politiques contribuèrent à construire l’image de la Pologne en France. La propagande musicale s’inscrivait dans un programme plus large de promotion de l’art polonais à l’étranger soutenu par des institutions nationales, des institutions partenaires en France et des animateurs culturels locaux.

Édouard Ganche et la propagande musicale polonaise en France

Président de la société Frédéric Chopin, collectionneur et musicographe, Édouard Ganche consacra sa vie à protéger l’héritage Chopin et à propager toutes connaissances relatives à l’œuvre du musicien. Il organisa des pèlerinages sur la tombe de Chopin, inaugura des plaques mémorielles à Paris et à Marseille, ouvrit un musée Chopin à Valldemossa, célébra en 1931 le centième anniversaire de l’arrivée de Chopin à Paris. Ganche disposait d’un riche carnet d’adresses dans les milieux artistiques, politiques et dans la haute   société. Il accédait facilement aux décisionnaires, obtenait des fonds et savait gérer des projets. C’était un excellent manager.

Ses activités au profit de la Pologne ne se limitèrent pas à la promotion de Chopin. Il fut également l’initiateur de la création du Dépôt général de la musique polonaise à Paris. Il noua des contacts avec des éditeurs de Varsovie et de Cracovie, avec l’Universal Edition de Vienne (l’éditeur principal de Szymanowski), qui envoyaient à Paris les partitions des compositeurs polonais. Celles-ci étaient déposées dans le magasin de monsieur Rossignol, 4 avenue de Villiers avec délai de paiement différé. Ganche fut également un critique musical actif et un éditorialiste. Pendant dix ans, il dirigea le service musical du périodique La Pologne politique, économique, littéraire et artistique. Il fut chroniqueur des événements polonais à Paris et dans le reste de la France.

Sa stratégie de propagande musicale s’allia avec l’activité de deux organisations polonophiles dont les missions s’accordaient avec la sienne, mais qui touchaient des publics différents. La première, l’Association France-Pologne, fonctionnait à Paris en collaboration étroite avec l’ambassade de Pologne et la chambre de commerce franco-polonaise. La seconde, Les amis de la Pologne, fonctionnant en province, remplissait une importante fonction sociale en développant divers types d’activités dont l’organisation de grands concerts, de commémorations, de la fête nationale, de conférences-concerts, d’actions caritatives.

Robert Brussel : l’internationalisme musical et les relations avec la Pologne

Une perspective intéressante se dévoile devant les échanges culturels organisés dans l’entre-deux-guerres à l’échelle européenne. Le paysage musical se métamorphosa et ne cessa d’évoluer après la Grande Guerre. La nouvelle situation géopolitique n’impacta pas seule cette réalité. N’oublions pas toutes les formes de collaboration internationale qui facilitèrent des contacts multilatéraux et renforcèrent le sentiment d’appartenance à une communauté artistique, un sentiment du « vivre ensemble » de plus en plus prégnant à partir de la moitié des années 30 lorsque la culture et l’art furent convoqués pour lutter contre le fascisme.

La France joua un rôle important dans la création d’un réseau international de relations et de contacts. L’Association française d’expansion et d’échanges artistiques (AFEEA), dirigée par Robert Brussel, cherchait à réaliser cet objectif. Pour Brussel, une telle activité ne pouvait s’appuyer que sur un partage des compétences et la transmission des informations. Le « Service d’études » qu’il fonda n’avait pas d’équivalent en Europe. Il rassemblait les informations que la presse publiait sur les concerts, des programmes, des brochures et des CV d’artistes. Cette grande base de données permettait de faciliter l’organisation et la gestion de projets internationaux. Cette source, aujourd’hui accessible en tant que Fonds Monpensier, comprend une section polonaise Fonds Monpensier : Pologne.

Robert Brussel connaissait parfaitement les questions polonaises. Il admirait Szymanowski, s’était lié d’amitié avec Wanda Landowska, assistait aux concerts de l’Association des jeunes musiciens polonais et possédait un carnet d’adresses fourni à Varsovie, ville qu’il avait visitée en 1926. Il avait alors rencontré de nombreux artistes et animateurs culturels. Ses notes portent la trace de ces rencontres et de la profusion de ses idées de projets. De leur côté, les partenaires polonais profitèrent de son expérience. En 1926, Towarzystwo Szerzenia Sztuki Polskiej wśród Obcych (TOSSPO) [l’Association de propagation de l’art polonais à l’étranger], semblable à l’AFEEA, vit ainsi le jour.

En tant qu’animateur et animateur culturel attentif, Brussel voyait la carte de l’Europe d’un point de vue global. La Pologne, dotée d’un bagage culturel passé et contemporain, y affirma sa spécificité d’une manière de plus en plus contrastée. Brussel traita de cette question dans le Figaro.

 

Publié en septembre 2020
Légende de l'illustration : Grand Concert de Gala franco-polonais. 1918  

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