La richesse est la première constatation qui s’impose à qui aborde les ressources documentaires de la Bibliothèque nationale sur l’ancienne Indochine française. Celle-ci a duré 85 ans, de 1860 au 1945. La majorité des fonds qualifiés indochinois concerne le Vietnam.
Le Gouvernement général de l’Indochine fonctionna comme un État, doté des institutions nécessaires pour assurer son fonctionnement, par exemple le Budget général de l’Indochine fut une de ses spécificités et la clé de voûte de son fonctionnement qui engloba l’administration, l’économie et la culture.
L’appareil de gouvernement et de gestion a laissé de très nombreuses traces rassemblées dans le Fonds indochinois de la BnF. La raison principale est la création du Dépôt légal en 1922 qui obligea, en principe, les possessions françaises : Vietnam, Cambodge et Laos à verser leurs publications à la Bibliothèque nationale. À cette documentation issue des organismes d’état est venue s’ajouter les traces produites par la société civile principalement la presse en langue française mais également en quốc ngữ et en chinois.
Les bibliothécaires de la BnF (Christiane Rageau, Lê Thị Ngọc Anh et Thérèse Ehling, J-C Poitelon et Nguyễn Tất Đắc, Denis Gazquez) ont créé des instruments indispensables pour les chercheurs en histoire de l’Indochine, en particulier du Vietnam. Trois riches répertoires (imprimés ou microfiches) sont à la disposition des lecteurs :
- En 1988, est publié le Catalogue du fonds vietnamien : 1890-1921,
- En 1980, le Catalogue du Fonds indochinois : 1922-1954,
- En 1993, Catalogue des périodiques vietnamiens (2.350 publications sur 2800 microfiches).
Le projet français de colonisation de l’Indochine associait voire entrelaçait étroitement les activités économiques, financières, l’enseignement et la santé. Nul autre que le ministre des colonies Albert Sarraut l’a mieux défini en 1917 : « Notre colonie doit être conçue comme une grande entreprise économique établie sur l’assise puissante d’une œuvre de civilisation morale. ».
Ces activités étaient conçues, portées et actées (pour oser un néologisme) par des institutions qui, chacune ou la plupart, possédaient leurs publications qui étaient alors destinées à mesurer les progrès de l’œuvre de colonisation et à les porter à la connaissance des acteurs autant que du public métropolitain et local.
L’Instrument de communication de la politique sarrautiste fut l’Agence économique de l’Indochine fondée en 1917. Elle publia régulièrement le Bulletin de l’Agence économique de l’Indochine de 1928 à 1937. La BnF en possède 38 numéros consultables sur Gallica. En outre l’Agence publia une série de brochures sur les ressources naturelles de l’Indochine : bois, coton, caoutchouc etc. mais également sur le régime douanier, la législation, les tarifs, etc.
La BnF possède de nombreuses publications comme celles publiées par la Banque de l’Indochine (BIC) qui joua un rôle déterminant dans l’évolution de l’économie indochinoise. Dans l’empire colonial français, la BIC possédait le privilège d’émission de la monnaie, la piastre indochinoise qui ne cessa qu’avec le retrait de la France de l’Extrême-Orient. Elle avait étendu ses activités en Chine, dans l’Océan indien et en Océanie.
Une documentation abondante a été produite par tous les services généraux du Gouvernement général : Direction des finances, Direction des Services économiques qui a publié le Résumé statistique de 1913 à 1940, l’Inspection générale du Travail fondée en 1927, l’Institut des recherches agronomiques (1918-1925), l’Instruction publique créée en 1920, l’Institut Pasteur de l’Indochine, L’Inspection générale de l’hygiène et de la santé publiques (à partir de 1932). L’instrument de recherche principal est l’ouvrage exhaustif de Denis Gazquez : Inventaire analytique des Publications officielles de l’Indochine coloniale (1859-1954) où les fonds de la BnF figurent au premier rang.
Le Bulletin économique de l’Indochine est capital parce qu’il rassemble de nombreux rapports et statistiques dispersés dans les publications des services de l’administration coloniale ou qui ont cessé de paraître ou d’être rendues publiques. Ce fut le cas des données rassemblées par la Direction générale de l’agriculture, de l’élevage et des forêts, par la Direction des Finances, Inspection générale des mines et de l'industrie, l’Institut des recherches agronomiques, l’Office indochinois du riz, des Services météorologiques, etc… Les Annales des Douanes et Régies de l’Indochine furent publiées de 1905 à 1944.
D’autres publications contiennent une vision globale (administration, économie et vie sociale) pour chaque pays de l’Indochine française. En voici quatre exemples :
- À partir de 1922, les Procès-verbaux du Conseil colonial de la Cochinchine présentent l’état de la colonie. En 1897, Le Bulletin de la Chambre d’agriculture de la Cochinchine devient le Bulletin du Comité agricole et industriel de la Cochinchine auquel succéda la Revue de la Société des études indochinoises (publiée jusqu’en 1975).
- Les Compte-rendu des travaux de la Chambre des Représentants du Peuple du Tonkin (1926-1939 ) ont été édités en 14 volumes (coté 4-LK19-583) dont 12 numéros sont disponibles sur Gallica .
- Ceux de la Chambre des Représentants du Peuple de l’Annam
- Le Journal officiel du Vietnam, Công Báo Việt Nam (1859-1954) est rassemblé en 8 volumes par le ministère de la Justice à Saïgon, de 1948 à 1955.
La BnF possède également l’État du Vietnam 1946-1954 ; pendant la première guerre d’Indochine où l’attention et les informations portaient principalement sur le conflit militaire, le recueil est une vision globale de la situation de l’Indochine. L’Éveil économique de l’Indochine est le journal qui accompagne la croissance économique de l’Indochine de 1920 à 1935. Il est le miroir de l’essor et de la prospérité économique indochinoise, copié sur MFILM JO-56309 et NUMP – 4325. Aujourd’hui, 625 numéros sont consultables sur Gallica.
Publié en février 2021