Le dépôt légal en Indochine coloniale

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Les ouvrages et périodiques imprimés en Indochine sont particulièrement nombreux dans les collections de la Bibliothèque nationale de France. C’est le résultat de la généralisation de l’écriture du vietnamien en lettres latines, le quốc ngữ qui favorise l’édition, de l’instauration du dépôt légal et surtout de son perfectionnement par Paul Boudet en 1922.

Presse à imprimer et quốc ngữ

Dès la conquête de la Cochinchine l’administration coloniale édite en français périodiques, brochures, codes juridiques… On peut dire que la presse à imprimer a accompagné le sabre de la conquête. Dès 1862 est publié à Saigon le Bulletin officiel de l’expédition de Cochinchine. Les ouvrages édités en français sont nombreux et arrivent en partie  à la Bibliothèque nationale, le dépôt légal français s’applique aussi pour les publications coloniales mais il est aléatoire. Les ouvrages sont traités comme ceux édités en France et recensés dans le Catalogue général.

L’édition a connu un extraordinaire développement dès le XIXe siècle, grâce à l’adoption du quốc ngữ et aux particularités de la colonisation de l’Indochine. Tous adoptent la nouvelle écriture : missionnaires, administration, nouvelles élites indochinoises et même ceux qui s’opposent au système colonial. De1874 à 1921 environ un millier de livres en quốc ngữ sont intégrés dans le fonds général.

Les autorités coloniales vont conserver l’administration indigène locale et la faire fonctionner à leur service. Mais cette nombreuse administration indigène doit être formée. Une partie est en relation suivie avec les administrateurs coloniaux : se crée ainsi un besoin de scolarisation en langues locales mais aussi un besoin limité d’écoles primaires en français. La faiblesse de la population civile française oblige aussi les colons et les entreprises coloniales à embaucher des indochinois formés.

 

1922 : création du dépôt légal spécifique

Albert Sarraut (1872-1962), partisan d’une mise en valeur des colonies, va créer un nouveau système d’enseignement franco-vietnamien sans enseignements traditionnels. Il crée ainsi de nouveaux  lecteurs et de nouveaux auteurs, les futures élites vietnamiennes qui vont favoriser un accroissement considérable de l’édition en français et surtout en vietnamien.

Cette dernière dès 1922 est plus importante que l’édition en français. Elle multiplie par 3 ou 4 le nombre annuel de titres édités entre 1922 et 1929. En 1923 : 147 titres édités en vietnamien et 103 en français, en 1929 : 643 titres en vietnamien et 233 en français.

Paul Boudet (1888-1948), Directeur des Archives et des Bibliothèques de l’Indochine, organise le dépôt légal spécifique pour l’Indochine ; dépôt de 2 exemplaires de toutes les publications, un pour la Bibliothèque de Hanoi et un autre pour la Bibliothèque nationale de Paris. Le dépôt légal devient effectif pour la plupart des publications.

Les  imprimés en français et les périodiques en quốc ngữ édités entre 1922 et 1954 continuent  à être traités dans le fonds général. Par contre les livres, brochures et plaquettes en vietnamien sont mis de côté et formeront le Fonds Indochinois.

Il n’existe pas de catalogue particulier pour les ouvrages en français édités en Indochine mais on peut utiliser la Bibliotheca indosinica d’Henri Cordier pour la période qui va de la conquête à 1912, et la Bibliographie de l’Indochine française de Paul Boudet pour la période 1913 à 1935.
 

 Le Fonds Indochinois

12 000 ouvrages en quốc ngữ vont arriver entre 1922 et 1940 et dans une moindre mesure entre 1940 et 1954.
Difficiles à traiter en raison de leur langue mais aussi de leur aspect extérieur et de leurs sujets, ces ouvrages ne seront catalogués qu’à partir de la fin des années 1960 sous la responsabilité de Christiane Rageau. Ils seront rassemblés sous une cote unique INDOCH, précédée du format : Fol, 4, 8, 16 et suivie pour la moitié des ouvrages par la mention Pièce car il y a de nombreuses brochures. Ils sont recensés dans un catalogue (1e édition en 1979, 2e en 1988) puis reproduits sur microfiches.

Ils sont d’une très grande variété : traductions d’ouvrages occidentaux (textes administratifs ou religieux, œuvres littéraires), vulgarisation de l’apport occidental (manuels scolaires et pratiques, textes économiques, juridiques, scientifiques et techniques), œuvres classiques vietnamiennes (littérature vietnamienne et chinoise, textes confucianistes, bouddhistes ou taoïstes…), nouvelles créations (roman, théâtre, poésie, littérature pour enfants, essais, textes religieux, ouvrages historiques…).

 

Publié en février 2021